Transactions plus rapides, économies sur les opérations, protection accrue des informations… La technologie Blockchain semble bien partie pour révolutionner le monde de la banque. Promise à un bel avenir, son influence s’étend déjà au-delà de la finance. Quelle est la définition de la Blockchain ? Comment fonctionne-t-elle ? Qui l’utilise ? Quel est l’impact de la Blockchain en France ? Quels futurs possibles ? Autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre dans cet article.
Blockchain : Définition
Avant toute chose, il faut rappeler que la Blockchain (ou chaîne de blocs en français) est la technologie utilisée par Bitcoin. Concrètement, il s’agit d’un registre virtuel immense regroupant toutes les transactions effectuées par des utilisateurs. À l’heure actuelle, cette technologie est avant tout utilisée pour tracer et gérer les transactions financières réalisées à l’aide de crypto-monnaies.
Il est important également de comprendre que la Blockchain n’est pas régie par des hommes mais par des protocoles techniques. Ainsi, elle se veut 100% fiable car chaque transaction est calculée et vérifiée par de puissants algorithmes avant d’être validée. L’objectif ? Empêcher toute fraude ou manipulation des transactions financières. Bien qu’elle se soit fait connaître à travers le Bitcoin, cette technologie peut avoir de nombreux autres usages puisqu’elle permet de valider et sécuriser n’importe quel échange de données. À l’avenir, la Blockchain pourra servir lors d’élections, pour la mise en place de contrats, le transfert d’héritages…

Une des 50 pépites françaises de la fintech
La Blockchain se veut inviolable, pourtant Bitcoin a fait l’objet de pratiques malhonnêtes par le passé. On pense notamment au comportement plus que douteux de Mark Karpelès, l’ancien patron d’une importante plateforme de Bitcoin. Pourquoi miser sur cette technologie dans ce cas ? En théorie, elle est effectivement transparente et empêche quiconque de cacher ou falsifier des données. Dans le cas de Bitcoin, son utilisation a été détournée de ses principes de base, d’où certaines dérives évoquées ci-dessus. Mais Georges Nahon, le CEO d’Orange Lab, l’affirme : (ces dérives) n’ont rien à voir avec la puissance et la sophistication intrinsèque de cette technologie. Ajoutons à cela que la principale attaque réussie sur le protocole (en 2010, des hackers ont tiré parti d’un bug pour diffuser 184 milliards de faux Bitcoins) fut en réalité contrecarrée en quelques heures (bug corrigé et faux Bitcoins retirés de la circulation). En effet, grâce au caractère open source du protocole, plusieurs informaticiens chevronnés ont pu collaborer pour intervenir de manière éclair.
Blockchain : Explication du concept et de l’algorithme
La Blockchain, comment ça marche ? À chaque fois qu’un utilisateur utilise une technologie basée sur la Blockchain, les transactions qu’il réalise sont stockées sur une plateforme décentralisée (distributed ledger). Ces différentes transactions enregistrées viennent constituer un « bloc ». Après avoir stocké l’ensemble des données récentes, ce bloc s’intègre à la chaîne globale. Dès lors, les informations ne sont plus modifiables car chaque bloc garde une trace de la transaction et se lie aux autres en respectant un ordre chronologique.
À chaque nouvelle transaction effectuée par un internaute, plusieurs algorithmes analysent l’historique présent dans la chaîne de blocs. Ce mécanisme de contrôle permet non seulement de sécuriser la transaction mais également de la valider.
Si l’on devait faire une analogie avec un service bancaire classique, les blocs seraient comme un relevé bancaire partiel. Mis bout à bout, ils constitueraient l’historique complet des transactions d’un client, autrement dit la Blockchain globale.
Les algorithmes de la Blockchain, c’est quoi ? Ce serait un certain Satoshi Nakamoto qui aurait inventé les algorithmes utilisés par la Blockchain. À chaque opération, un premier bloc doit valider l’opération en l’analysant grâce à un algorithme. Après cela, il transmet l’information au bloc suivant afin qu’il fasse de même. Cette vérification se répète pour tous les blocs. Une fois que toute la chaîne de blocs a accordé sa confiance à la transaction, celle-ci est validée et réalisée. Dans le cas contraire, si « un maillon est cassé », l’opération est annulée.
Blockchain : Déjà des limites ?
Alors que la Blockchain est encore peu répandue, elle est déjà mise en question. Tout d’abord, c’est sa vitesse de fonctionnement qui pose problème. De par les nombreux mécanismes de contrôle, les transactions mettent plus de temps à être validées et donc réalisées. Pour exemple, cette technologie est capable de valider 7 actions par seconde contre 56 000 pour Visa.
Autre problème, la Blockchain ne cesse de grandir puisque chaque transaction vient se rajouter aux précédentes. C’est donc l’essence même de la Blockchain qui pose la question de la méthode de stockage des données et de leur synchronisation.
Cette technologie semble également remettre en cause la souveraineté des États et des banques. En effet, de par son fonctionnement même, le rôle de ces deux entités tend à diminuer car ils n’auraient plus aucun contrôle sur les différentes transactions.
Dernier problème et non des moindres, la chaîne de blocs se veut totalement décentralisée et indépendante. Or, à partir du moment où une entité entre en possession de plus de 50% des données, elle aurait un contrôle total de l’ensemble des blocs. Un procédé qui a d’ailleurs de nombreuses similitudes avec une prise ce contrôle. Détenir plus de 50% de la Blockchain permettrait notamment de refuser des opérations et de valider ce qu’on appelle des doubles dépenses (supprimer ses dépenses de l’historique et récupérer la somme envoyée). Cependant, pour prendre le contrôle, il faudrait implémenter autant de transactions dans la chaîne de blocs qu’elle n’en contient au moment de l’opération. Ce qui semble improbable au vu du grand nombre de blocs actuels (voir exemple ci-dessous pour mieux comprendre le principe).
Exemple : Une Blockchain compte X données. Pour détenir 50% des données totales, il faudrait ajouter X données. Ainsi, l’entité détiendrait la moitié des 2X de données totales.
Blockchain : Une menace pour les banques…
À l’heure actuelle, la France a du retard sur les Etats-Unis et la Grande Bretagne pour ce qui est de l’utilisation de la Blockchain. En effet, certaines entreprises outre-Atlantique conçoivent d’ores et déjà des moyens de paiement basés sur cette technologie. En Europe, bien que des avancées notables aient été réalisées (la Banque d’Angleterre travaille sur le sujet), les sociétés n’en sont qu’aux balbutiements.
L’appréhension des banques vis-à-vis de la généralisation de la Blockchain en serait-elle la cause ? Probablement. En effet, elle offre la possibilité à deux personnes ou entités ne se connaissant pas de réaliser des transactions en toute confiance. Or, pour le moment, ces échanges sécurisés sont garantis par des organismes de contrôle et notamment des banques. Ces derniers génèrent des revenus grâce à ce service de sécurisation. Dans les années à venir, les établissements bancaires pourraient donc se voir concurrencer par des sociétés utilisant la Blockchain.
Non seulement cette évolution semble bouleverser le modèle économique des banques, mais elle diminue également leur champ d’intervention. Effectivement, les organismes financiers classiques sont aujourd’hui incapables d’identifier une transaction réalisée via un système de crypto-monnaie, que celui-ci soit Bitcoin, Ripple ou encore Litecoin. De ce fait, s’il devait y avoir une généralisation de la technologie Blockchain, les banques verraient leur contrôle des opérations financières sensiblement réduit. Tout du moins, si elles ne s’adaptaient pas.
… Ou une belle opportunité de développement ?
La Blockchain marque-t-elle la fin des banques ? Pas nécessairement. Malgré une peur évidente de l’inconnu, plusieurs services bancaires songent à l’évolution de leur mode de fonctionnement afin d’utiliser cette technologie. Bien que cette innovation présente un risque pour leur activité, elle offre également de belles opportunités de développement et d’économies. On pense notamment à la possibilité de :
- diminuer les coûts de traitement : en adoptant cette technologie, les banques seraient en mesure de réduire leurs frais de traitement pour chaque transaction. Ce serait ainsi une belle occasion de regagner le cœur de clients partis vers des services moins onéreux (MoneyGram…). Selon l’établissement espagnol Banco Santander, les banques pourraient économiser entre 15 et 20 milliards de dollars chaque année d’ici 2022 grâce au Blockchain.
- réduire les risques : la Blockchain permettrait aux banques de mettre en relation acheteurs et vendeurs en toute confiance. Les menaces de paiement frauduleux seraient en effet minimisées.
- raccourcir les délais de prise en compte des opérations : à l’heure actuelle, plusieurs jours sont nécessaires pour que des produits financiers changent de main à la suite d’une opération. Or, entre-temps, l’un des acteurs pourrait devenir insolvable. Les opérations étant quasi-immédiates avec la Blockchain, ce risque deviendrait nul.
- réduire les dépenses allouées à la sécurisation des informations : cette technologie permet de réaliser des opérations en limitant fortement le nombre de renseignements à fournir. La réduction des informations personnelles limite mécaniquement le besoin de sécuriser ces informations. Cela permettrait donc des économies pour les établissements bancaires.
Blockchain : Concrètement, qui l’utilise ?
Le principal utilisateur de la technologie Blockchain est Bitcoin. Le service de paiement l’utilise pour valider et rendre effectives les transactions de ses utilisateurs.
Mais d’autres entreprises s’apprêtent également à sauter le pas. C’est le cas notamment d’IBM et d’Intel. Les deux sociétés informatiques souhaiteraient en effet mettre en place un nouveau système de paiement utilisant la Blockchain. L’objectif ne serait pas de créer une nouvelle crypto-monnaie, mais bel et bien d’échanger de l’euro ou du dollar. L’infrastructure permettrait ainsi à des personnes physiques de réaliser des transactions financières plus fiables, moins coûteuses et surtout ne nécessitant aucune interaction avec une banque.
Il y a peu de temps, Microsoft a aussi franchi le pas. L’entreprise américaine a en effet créé une nouvelle monnaie virtuelle nommée Ether, basée sur la Blockchain. Celle-ci pourra être utilisée par les utilisateurs d’Azure, une plateforme de cloud computing, lors de toutes leurs transactions et échanges de données.
Blockchain : Et demain ?
À en croire l’engouement suscité actuellement par la Blockchain, cette technologie a de beaux jours devant elle. Conscientes de l’enjeu, plusieurs grandes banques internationales (Goldman Sachs, Barclays, Bank of America…) se sont associées à la start-up R3 afin de développer des applications commerciales basées sur cette technologie.
Mais au-delà de cet exemple, la Blockchain semble offrir de nombreux débouchés. Permettant d’échanger des actifs sans avoir à passer par un tiers (désintermédiation), cette technologie pourrait en effet servir à réaliser des transactions financières, distribuer un héritage, tenir le compte de points fidélité…
Son utilisation dans la gestion de données non financières semble aussi une piste pour le futur, au vu de la sécurisation qu’elle offre. On notera d’ailleurs que le Honduras songe à enregistrer son cadastre sur un système utilisant la Blockchain, tout comme le Royaume-Uni pour ses bases de données officielles. Alors, révolution ou effet de mode ? L’avenir nous le dira.